Contrairement aux autres unités fondamentales du Système International, définies via les constantes fondamentales de la physique (constante de Planck, vitesse de la lumière, fréquence de transition hyperfine du césium 133 …), le Kilogramme reste la seule unité définie par un artéfact, l’International Prototype of the Kilogram (IPK). S’il était adéquat et scientifiquement cohérent en 1889 de définir le kilogramme au moyen d’un cylindre de platine iridié, la Figure suivante montre que même au prix de conditions de conservation extrêmes et rigoureuses, des dérives temporelles des masses de l’IPK et de ses copies sont inévitables et imprévisibles (Metrologia 52 310-316(2015)) :
Cette Figure montre également qu’il est impossible de définir de manière identique le kilogramme en deux endroits distincts (à partir de l’artefact original ou de l’une de ses copies par exemple), les copies présentant toute des évolutions leur étant propres.
Ces manques d’unicité dans la définition du kilogramme ont poussés les scientifiques à mettre au point de nouvelles méthodes de définition, ne faisant intervenir que des constantes physiques universelles, comme c’est le cas pour les autres unités fondamentales. Dans la brochure du Bureau International des Poids et Mesures (BIPM), la redéfinition prévue pour le kilogramme en 2018 serait la suivante :
La redéfinition des unités du SI implique donc de fixer les constantes physiques dont elles dépendent, de manière à obtenir des définitions univoques et valables en tout lieu, indépendamment de la personne qui utilise la définition. Afin de pouvoir obtenir des valeurs précises pour la définition des unités fondamentales, il convient que les constantes physiques soient elles-mêmes déterminées avec autant d’exactitude que faire se peut avant d’être fixées. Ce but se réalise par la mise au point d’expériences dédiées, basées sur des phénomènes et dispositifs physiques connus précisément.
Si la valeur de la fréquence de transition hyperfine du Césium et la vitesse de la lumière ont été fixées précédemment par le BIPM et la CGPM (Conférence générale des poids et mesures), des travaux expérimentaux de pointes sont actuellement en cours afin de déterminer le plus exactement possible la valeur de la constante de Planck en vue de la fixation de sa valeur fin 2018. Ces travaux sont coordonnés par différents Institut Nationaux de Métrologie (INM) tels que le NIST (USA), le NRC (Canada) ou encore le LNE (France) et impliquent un dispositif expérimental appelé balance du Watt, ou balance de Kibble en référence à son concepteur. Historiquement, cette balance fut proposée pour la première fois par Ampère, dans le but de définir l’unité fondamentale de courant du même nom à partir de l’IPK (référence de masse de l’époque). Les développements ultérieurs de la physique (effet Josephson et effet Hall quantique) et la modification du principe de la balance par Kibble ont permis de la transformer en une sonde pour la constante de Planck. Une fois la constante de Planck fixée, cette balance, grâce à sa précision, permettra de définir l’unité de masse sur un domaine allant du microgramme au kilogramme, et avec une précision de quelques part pour cent million, ce qui représente une amélioration considérable par rapport aux définitions actuelles.
Cette redéfinition des unités fondamentales du SI représente une évolution considérable pour la métrologie et la mesure. C’est en effet la première fois depuis l’instauration du SI que les unités fondamentales seront toutes définies au moyen des constantes physiques naturelles. Bien que cette démarche contribuera assurément à l’évolution et à l’amélioration de la précision de la mesure, il est clair que les progrès technologiques et scientifiques futurs nous mènerons plus que certainement à de futures définitions des unités fondamentales du SI, ne fusse que par la fixation des constantes physiques à des valeurs encore plus précises.
« Dans le nouvel SI, quatre des sept unités de base du SI – à savoir le kilogramme, l'ampère, le kelvin et la mole – seront redéfinies en s'appuyant sur des constantes de la nature ; les nouvelles définitions seront établies à partir des valeurs numériques fixées de la constante de Planck (h), de la charge élémentaire (e), de la constante de Boltzmann (k) et de la constante d'Avogadro (NA), respectivement. De plus, les définitions des sept unités de base du SI seront toutes exprimées de façon uniforme à l'aide d'une formulation dite « à constante explicite » et des mises en pratique spécifiques seront élaborées afin d'expliquer comment réaliser pratiquement la définition de chacune des unités de base » (BIPM).